jeudi 10 septembre 2009

Ça craint.

Alentejo, troupeau de porcs, avril 2009
Ça craint. Expression entendue, vécue, bien commode au demeurant.
Un raccourci expressif et définitif, qui élimine ce et ceux qui gênent, molestent, ennuient, repoussent ou importunent, la liste est bien longue tant l'amour du prochain est ordinairement malmené dans nos paysages relationnels.
Ça craint, si l'on n'a pas le bon déodorant ; la bonne répartie, la bonne apparence ou aspect. Si l'on appartient à un groupe non admis, si l'on pratique une activité un tant soit peu divergente dont nos repères ne permettent pas de reconnaître le "bienfondé".
Or il y a quelqu'un qui n'a pas craint de s'approcher d'une terrifiante misère, la misère de l'homme mordu par les loups de l'enfer, sali par les pires des cloaques -ceux qui sortent de son propre cœur, de sa propre et triste habitude du péché ; de cet abîme que tous nous abritons et qui nous est intime, aussi avancé soyons nous sur la route de l'effort.
Quelqu'Un qui n'a pas craint de se rapprocher de nous, de nous étreindre, nous les hommes devenus lépreux par la chute, membres de la malheureuse famille, noble par ses origines mais bel et bien déchue, d'Adam l'exilé définitif de l'Eden. Famille des rachetables, mais tant que nous ne sommes pas rachetés, quels sentiments pouvons-nous inspirer à la lumière née de la lumière ?
Or Toi notre Dieu, dont la présence radieuse est certainement incompatible avec le plus petit grain de poussière, Tu avais toutes les meilleures raisons de "craindre" notre aspect repoussant et sale.
Et pourtant comment ne pas être frappés d'étonnement en considérant les initiatives que Tu prends, Toi Jésus, notre divin sauveur ?
Non horruisti Virginis uterum,  dit magnifiquement l'hymne ancienne du Te Deum, enfermant un prodigieux mystère, celui de notre Rédemption, celui de notre Relèvement après la chute, en 4 mots d'une élégance précise et presque "chirurgicale".
Tu n'as pas craint de contact du sein d'une Vierge.
Tu n'as pas craint de nous embrasser jusqu'à prendre toute - et complètement - notre nature d'hommes.
Toi la Lumière, tu t'es dégradé jusqu'à notre matière, et ce faisant tu nous as donné la plus grande des noblesses.
Tu t'es abaissé indiciblement pour nous relever, et tu ne cesses depuis de nous diviniser, comme disent les orthodoxes, suivant en cela les trouvailles audacieuses des hébreux : le psaume 8 affirmait déjà des centaines d'années avant le surgissement du christianisme :
Qu’est donc l’homme pour que tu penses à lui,
l’être humain pour que tu t’en soucies ?
Tu en as presque fait un dieu.

Psaume 8 ,5-6
Mieux encore :
Tu nous enseignes l'amour du Père, grâce à la parabole de l'enfant prodigue. (Luc 15:11–32)
Presque tout le monde la connaît ; l'histoire de cet homme jeune qui demande une avance sur héritage, la dilapide, s'en allant dans des contrées lointaines (celles du péché) et finit par garder, suprême dégradation aux yeux des contemporains de Jésus, des pourceaux - de vulgaires cochons pour ne pas mourir complètement de faim.
Quand le fils prodigue revient à la maison, son père le serre contre son cœur, sans s’arrêter à son odeur de cochon, à sa saleté de cochon, à son aspect de gardien de cochons.
Merveilleuse étreinte, celle du Seigneur lui-même, qui nous restaure dans notre dignité de fils de Dieu, et nous recrée à son image, même si nos désirs, nos habitudes et nos circonstances font de nous des pestiférés.
Avec Toi, mon Dieu, « ça » ne craint pas.
Béni sois tu aussi pour cela.
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Les armes du combat :
Psaume 8 ,5-6
Qu’est donc l’homme pour que tu penses à lui,
l’être humain pour que tu t’en soucies ?
Tu en as presque fait un dieu

1 commentaire:

  1. Très convaincante la chute, l'amour divin qui accepte notre crasse de pouilleux et notre odeur de cochon pour nous restaurer dans notre dignité !!

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