samedi 24 octobre 2009

Manger des oignons, oui mais pour l’amour du Christ.

Le Moine et la Croix, dessin de Fray María Rafael
J+M

Le jeune saint Fray Maria Rafael (jeune parce qu’il a été canonisé ce mois-ci, et jeune par ce qu’il avait gravi tous les échelons de l’héroïcité des vertus à l’âge de 27 ans) nous livre dans ses écrits une piste intéressante pour qui veut échapper à la seule tristesse au monde ; selon le mot de Léon Bloy, celle de ne pas être saint.
Manger des oignons, oui mais manger des oignons pour l’amour du Christ. Exclamation d’une force extraordinaire, écrite quelques jours avant d’arriver au Ciel.
Ici manger des oignons signifie faire quelque chose d’extrêmement banal, sans l’ombre d’une prétention à la transcendance. Dans l’Espagne de 1937 plongée dans la guerre civile, ce n’était pas une exclamation de dépit ou l’expression d’une volonté de sacrifice, cela renvoyait à une activité somme toute très quotidienne et terre à terre. Fray Maria Rafael décrypte cette quotidienneté et la pare de la seule vertu qui l’intéresse : atteindre Dieu. Il nous livre là un secret paradoxalement bien connu, mais fort peu appliqué, qui consiste à rencontrer Dieu dans l’espace même où il nous attend, dans ce rendez-vous intime que nous nous empressons ordinairement de rater, l’instant présent.
Revenons à ces oignons.
J’observe avec étonnement que cet aspirant chartreux qui n’a pu prononcer ses vœux qu’à l’article de la mort n’enrobe pas son chemin de perfection d’une idée de renoncement (jeûne, abstinence, mortification, cilices) mêmes si ce sont des voies qu’il a explorées dans l’enthousiasme de sa vocation.
Il ne nous dit pas « ne rien manger pour l’amour du Christ », ce qui semblerait entrer en cohérence avec l’idée que nous nous faisons des mortifications ordinaires de la Trappe mais bien « manger des oignons, oui, mais pour l’amour du Christ ».
Qu’est qu’au plan symbolique qu’un oignon ? On se souvient que ce légume faisait partie des nostalgies du peuple hébreu en route pour la Terre Promise lorsqu’il se rebella contre Moïse.
Ce n’est donc pas une pénitence que d’en manger, mais plutôt ici, dans la phrase de notre jeune ami mystique, l’expression d’une capacité de découverte : Dieu est présent dans tous les instants de notre vie, vie que nous tenons de lui, il n’y en a aucun qui Lui soit étranger, entrer dans une relation intime et étroite avec lui passe para cette reconnaissance de sa présence au cœur de nos vies, et par l’acceptation de son intimité.
Je mange des oignons, c'est-à-dire je prends mon café, je vais au supermarché, je lis (la Bible, le journal, un polar ou un Goncourt, peu importe) pour l’amour de Dieu.
On se retrouve là devant le fameux verset adressé par St Paul aux chrétiens de l’Eglise de Colosse.
Et quoi que vous fassiez, faites-le de bon cœur, comme pour le Seigneur, et non pour les hommes.
Vaste programme. Car il est bien évident que la présence du bien aimé dans nos instants ne peut pas ne pas passer par une recherche amoureuse de Sa volonté. Et cette identification à sa volonté nous configure nécessairement à Lui, et nous sanctifie, car Lui seul est saint, et si nous nous attachons à lui ressembler, nous y parviendrons, selon sa promesse « Cherchez, et vous trouverez ». (Matthieu 7:7)
Lui qui a dit « Sans Moi vous ne pouvez rien faire » nous offre l’étonnante possibilité de tout faire avec lui.
Merci à notre jeune ami espagnol (car les saints sont nos amis, ils nous accompagnent par leur prière, leur intercession, leur inspiration et toutes sortes de bienfaits que nous découvrirons quand nous seront au Ciel) de nous avoir laissé ces quelques indications qui permettent de ne pas perdre courage.
Qu’avec lui nous soyons capables de reconnaître à chaque étape de notre chemin du jour la présence ineffable de Celui qui nous aime, et de faire avec Lui chacune de nos actions, afin de pouvoir dire un jour comme l’Apôtre, en toute simplicité :
Ce n’est plus moi qui vit mais le Christ qui vit en moi

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Les armes du combat :

Colossiens 3:23
Et quoi que vous fassiez, faites-le de bon cœur, comme pour le Seigneur, et non pour les hommes.
Galates 2:20
Ce n’est plus moi qui vis mais le Christ qui vit en moi
Jean 15:5
Sans Moi vous ne pouvez rien faire
Matthieu 7:7
Cherchez, et vous trouverez.

1 commentaire:

  1. AH que voilà un programme que je comprends mieux et auquel j'adhère avec plus de facilité que celui qui confisque au quotidien sa part de banalité pour en faire un hymne trop compliqué pour ma perception binaire de la vie !! très savoureux les oignons

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